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MiraMIRAMémoire des Images Réanimées d'AlsaceCinémathèque régionale numérique

Portraits de cinéastes
      • Portrait de cinéastes : André, Pierre et Raymond Piganiol

      • Par Ondine Duché
      • Portrait de cinéastes : André, Pierre et Raymond Piganiol
        • Fonds Piganiol © MIRA
      • La collection Piganiol est composée de 29 films, tournés en 9,5 mm et en 16 mm, de 1927 à 1988, soit sur plus de soixante ans et trois générations de cinéastes. Ce fonds exceptionnel nous fait traverser le siècle depuis les débuts du cinéma amateur jusqu’à la période quasi contemporaine, croisant la grande Histoire avec l’intime du quotidien. L’originalité de la collection tient également aux nombreuses séquences tournées en haute montagne, dans le massif des Écrins, par le filmeur principal Pierre Piganiol, alpiniste passionné. Ces images conservent la trace de paysages glaciaires aujourd’hui en partie ou totalement disparus par l’effet du réchauffement climatique, leur donnant une dimension historique inattendue.

        Une collection intergénérationnelle

        Le fonds Piganiol réunit la production de trois générations de filmeurs : André, son fils Pierre et son petit-fils Raymond, qui ont assidûment pratiqué le cinéma et la photographie en amateurs confirmés. Les trois premiers films de la collection, qui portent le titre « Histoires anciennes », ont été tournés entre 1927 et 1936 par André Piganiol, archéologue et historien de renom, professeur à l’Université de Strasbourg à la période de réalisation de ces séquences, avant d’être nommé au Collège de France. On y suit principalement les temps de vacances et de villégiature de la famille, ainsi que les moments de jeux de la fratrie de trois enfants. L’aîné, Pierre, est élève au prestigieux lycée Henri IV à Paris dans les années 1930, où il reçoit de nombreux prix. Il retrouve ses jeunes frères et sœurs dans la joie à l’occasion des vacances, du côté de La Baule, des Sables-d’Olonne de la Bretagne ou encore du Cantal. 

        André Piganiol  Fonds Piganiol © MIRA /  © BNU de Strasbourg 

        Inaugurée en 1924 avec la commercialisation de la caméra Pathé Baby, la pratique du cinéma en amateur est, tout au long des premières décennies de son essor, l’apanage des classes aisées de la population. On découvre ainsi à travers ces images l’ambiance de la fin des années folles et le mode de vie de la société des loisirs. Les séquences sont admirablement filmées et font montre d’une recherche savante de composition de l’image, dans le cadre même d’une pratique familiale du cinéma. André Piganiol filme tout particulièrement de très beaux portraits de ses enfants ou de sa femme et capte des instants chargés de tendresse. La caméra semble parfois passer entre les mains de la mère, Germaine, nous laissant apprécier la multiplicité des liens étroits entre les différents membres de la famille et donnant également l’occasion d’apercevoir à l’image la figure du père, de manière générale peu représentée dans le cinéma amateur.

        Fonds Piganiol © MIRA

        Le cœur de la collection : les films de Pierre Piganiol

        Les films qui représentent toutefois la large majorité du fonds sont ceux de Pierre Piganiol, fils aîné d’André. Chimiste de profession, diplômé de l’École Normale Supérieure, il est au début de sa carrière « agrégé préparateur » pour les élèves de Normale Sup. Il est recruté en 1947 par le PDG de l’entreprise productrice de matériaux Saint-Gobain, afin de développer un laboratoire de chimie organique. Il combine tout au long de sa carrière nombre d’engagements en parallèle de son activité de directeur des recherches, puis de conseiller scientifique chez Saint-Gobain. Il siège par exemple au Conseil d’Administration de l’Institut national de Recherche agronomique (INRA) et du Centre national de la Recherche scientifique (CNRS). En 1962, il est nommé commissaire du pavillon français dans le cadre de l'exposition universelle de Seattle : le film Road-trip en famille à l’ouest des États-Unis est réalisé à la suite de cette mission. Il est désigné en 1958 par le général De Gaulle comme premier Délégué général à la recherche scientifique et technique (DGRST). 

        Pierre Piganiol en montagne Fonds Piganiol © MIRA / Pierre Piganiol en 1995 © Raymond Piganiol

        Après la clandestinité, filmer la Libération

        Les premiers films de cette seconde génération datent du courant de l’année 1944 et plus particulièrement au moment de la Libération de la Seine-et-Marne par les troupes états-uniennes et les résistant·e·s français·e·s. Ce tournant de la Seconde Guerre mondiale est également un moment de bascule pour Pierre Piganiol, qui peut enfin sortir de la clandestinité dans laquelle il est entré depuis février 1944. En effet, après sa mobilisation lors de la drôle de guerre, il est co-fondateur du réseau de résistance Vélite Thermopyles avec son camarade de l’ENS Raymond Croland. Ce dernier est arrêté le 4 février 1944 par la Gestapo, après avoir toutefois réussi à prévenir son ami du danger qui l’attendait. Un hasard providentiel amène la police allemande à arrêter un homonyme du chimiste, ce qui permet à celui-ci de se cacher, tout d’abord dans la haute vallée de la Chevreuse chez des religieuses, puis dans le hameau Macherin en Seine-et-Marne, chez les parents de sa femme Monique née Mossé. Le père de celle-ci, Fernand Mossé, a lui-même participé à la Résistance, dans le cadre notamment de la Bataille de l’eau lourde. Raymond Croland est tragiquement déporté et meurt en avril 1945 en Allemagne.

        Ainsi, les deux premiers films tournés en août 1944 retracent cette période de liesse dans une Seine-et-Marne à nouveau libre. Dès le 23 août et le passage en force des Alliés, les jeunes gens hissent haut le drapeau français sur la maison de famille de Macherin. On découvre dans le film Crime et châtiment : libération de la Seine-et-Marne en août 1944 les villages des environs en fête, célébrant chaleureusement le passage des militaires états-uniens dans la région. Le second film Promenades retrouvées laisse entendre par son titre combien ces mois de clandestinité furent terriblement lourd et le bonheur de la famille, qui a accueilli en 1943 son premier enfant, de retrouver des joies simples, comme se promener en forêt de Fontainebleau. Un troisième film passionnant retrace une mission spéciale confiée à Pierre Piganiol à la fin de la guerre : retrouver et rapatrier des archives industrielles et brevets scientifiques spoliés par les Allemands. Cette mission amène le petit groupe d’officiers à s’aventurer dans une Allemagne sous gouvernement militaire des Alliés, ravagée par des années de conflit. Le filmeur capte des images glaçantes des villes de Fribourg-en-Brigsau et de Stuttgart pour bonne partie en ruines, funeste sort partagé en France par certaines des villes des régions limitrophes alsaciennes.

        à gauche : Pierre Piganiol en habit militaire et sa fille Catherine / Fonds Piganiol © MIRA

        Le chalet des Prés : un chez soi à la montagne

        Au sortir de la guerre, les Piganiol cherchent un pied-à-terre dans un coin reculé de nature. Ils achètent avec la famille de Roger Buvat, ami biologiste du couple, deux chalets près du village de Puy-Saint-Vincent, au cœur du massif des Écrins dans les Hautes-Alpes. Les deux hommes acquièrent également un terrain avec l’idée de développer une station scientifique d’altitude dans cet espace naturel préservé – mais ce projet n’aboutit pas. Au fil des décennies et des travaux, le petit chalet rustique des Piganiol se voit doubler d’une maison cossue, agrémentée d’une grande piscine dans laquelle enfants, puis petits-enfants, s’ébattent joyeusement. Le chalet est un point de rencontre pour le groupe familial, retrouvailles qui se font progressivement plus rares une fois les enfants ayant grandi et fondé leurs propres familles. Saut à ski dans les bosses du jardin, promenades et randonnées dans les vallées alentour, cueillettes des fruits sauvages, fenaisons et entretien du potager, mais aussi soirées dansantes : les activités ne manquent jamais au chalet des Prés.

        L’attachement de la famille Piganiol à la région transparaît à travers les films du fonds : plusieurs d’entre eux captent de belles scènes lors de fêtes locales, notamment lors de la Saint-Vincent, ou encore des démonstrations du Bacchu-Ber, danse traditionnelle avec des épées (voir L’été en montagne : randonnées dans les glaciers et spectacle de danse traditionnelle). On retiendra toutefois tout particulièrement le film manifeste La fin des Eaux Vives, qui dénonce les effets de la construction d’un barrage sur l’écosystème du massif des Écrins au mitan des années 1950. Au confluent de la vallée de la Durance et de la vallée du Fournel, celui-ci a pour but d’alimenter en électricité l’usine d’exploitation d’aluminium de Péchiney à l’Argentière-la-Bessée. La basse vallée du Fournel est fortement impactée par cette construction, entraînant la disparition de nombreux torrents qui, au-delà de leur beauté naturelle, étaient nécessaires aux activités de pâturages des bergers ovins et bovins de la région. Le film s’attarde justement sur les paysages et les traditions pluriséculaires de la vallée, menacés par les avancées de l’industrie.

        Filmer la haute montagne

        Pierre Piganiol est un passionné de nature et plus particulièrement de haute montagne. Alpiniste chevronné, il parcourt inlassablement les vallées et les glaciers qui environnent le chalet des Prés. Les images qu’il capte des chaînes de montagnes des Écrins et de hauts sommets sont à couper le souffle – et d’autant plus impressionnantes lorsqu’on imagine l’effort que représente de réaliser de telles ascensions chargé de matériel cinématographique. Pierre Piganiol partage et transmet sa passion de l’alpinisme. Les enfants du filmeur sont ainsi initiés tôt à la randonnée en haute montagne. Quelques décennies plus tard, ce sont leurs propres enfants qui, au même âge, s’exercent à l’« école de glace » avec leur grand-père, équipés de piolets et de crampons et semblant déjà très expérimentés dans ce milieu.

        Le fonds est ainsi véritablement rythmé par ces randonnées alpines, dont les courses se répètent d’année en année, sans jamais que les images captées ne se ressemblent tout à fait. À chaque film, les sommets se présentent sous un jour nouveau, une lumière différente. L’alternance entre noir et blanc et couleurs permet de redécouvrir complètement les paysages. Les contrastes de gris parfois doux, parfois marqués, dessinent des paysages enneigés graphiques, qui tendent parfois presque à l’abstraction. En couleurs, les ombres de la neige et les montagnes dans la perspective aérienne se teintent parfois d’une couleur bleutée. La beauté de ces images se double d’une dimension historique, certainement insoupçonnée au moment de leur réalisation. En effet, nombre de ces paysages enneigés du massif des Écrins, comme le Pic d’Arsine ou le glacier Blanc, ont subi d’importantes fontes des glaces et ont aujourd’hui en partie ou totalement disparu.

        Fonds Piganiol © MIRA

        La passion transmise de l’image

        À travers cette collection, on assiste également à la manière dont la pratique de l’image se transmet de génération en génération. Bien que la caméra serve à André Piganiol, puis à Pierre Piganiol, à enregistrer des moments intimes de la vie familiale, elle est également un outil propre à l’expression formelle, comme en témoigne la composition maîtrisée des images. Ce dernier pratique également assidûment la photographie stéréoscopique sur plaques de verre 4,5 x 10,7 cm, puis sur film 35mm et installe un laboratoire photo dans le chalet de montagne. Ces films et photographies sont régulièrement visionnés en famille, projetés notamment dans l’appartement parisien des grands-parents Mossé. Raymond Piganiol s’essaye à son tour dans les années 1960 au cinéma et à la photographie grâce à la transmission de matériel par son grand-père et son père, respectivement une caméra Pathé Baby 9,5 mm et un appareil photo Voigtländer. Avec son argent de poche, l’adolescent se paye une caméra Pathé-Webo Magasine et trois bobines de film, qu’il introduit dans l’enceinte du lycée Louis-le-Grand, captant à la dérobée des scènes de ses camarades en cours et pendant les récréations (voir Ski aux Prés – Souvenirs du lycée Louis le Grand). Mais c’est davantage l’image fixe qui l’attire et à laquelle il se consacre finalement : il apparaît régulièrement à l’image avec de l’équipement photographique.

        Raymond Piganiol, à différents âges, équipé de matériel photographique / Fonds Piganiol © MIRA

        Ce sont ainsi des pratiques d’amateurs confirmés qui se transmettent sur trois générations. Jamais complètement dissociée des usages domestiques, l’attention soutenue à la composition de l’image, dont témoigne la qualité formelle de ces films, est mise au service de la mémoire familiale. Tout au long de ces soixante années de cinéma, la famille Piganiol a laissé derrière elle des images qui témoignent d’évènements cruciaux du XXe siècle comme l’expérience traumatique de la Seconde Guerre mondiale, mais qui permettent également de saisir, parfois en filigrane, de grandes transformations sociétales, telle la fin des années folles et les transformations des mœurs rurales, ou encore l’impact des activités de l’homme et de l’industrie sur les paysages naturels de haute montagne.

         

        L’autrice tient à remercier le déposant et filmeur Raymond Piganiol pour son aide à la documentation du fonds et d’avoir accepté de partager ses souvenirs.

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