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      • Au fil des rails, filmer le voyage en train

      • Par Antoine Mansier
      • Au fil des rails, filmer le voyage en train
      • Déjà bien présent dans l’imaginaire littéraire, le train a poursuivi sa route en images au travers du regard de cinéastes sensibles à sa beauté symbolique, et ce dès l’apparition du cinéma avec l’entrée fracassante du train en gare de la Ciotat sur la pellicule des frères Lumière (1). Les films amateurs se sont par la suite rapidement emparés de ce motif ferroviaire, de nombreux opérateurs ayant embarqué leur caméra pendant leur trajet en train pour en saisir le potentiel esthétique.

        Les collections de MIRA fourmillent de trains, de quais et de rails, capturés par des filmeurs dans l’effervescence et l’excitation de leur voyage. Dans cette masse documentaire, quelques films retiennent l’attention. Ceux qui, tournés en caméra embarquée ou qui surprennent par leur point de vue, font du voyage en train une expérience audiovisuelle et poétique.

        Le voyage en train, une source d'émerveillement pour les filmeurs

        Le chef de gare siffle. Il est l’heure de partir, le train démarre. Le quai nous quitte petit à petit, nous nous retrouvons emportés dans cette cage d’acier et de plastique. Les premières minutes passent et nous nous sommes déjà habitués à cohabiter dans cet étrange engin de mécanique et d’électricité. Œuvre d’art des temps modernes, cet objet de curiosité attire l’œil des opérateurs, plusieurs films mettant en avant le potentiel graphique du train. C’est le cas notamment dans un film d’Alex Schwobthaler de 1947, où le cinéaste capture sa dimension photogénique en s’amusant avec plusieurs angles de prises de vue. Caméra posée par terre, contre-plongées et gros plans font à la fois ressortir la force mécanique de la locomotive, sa carrosserie métallique et ses rouages, mais aussi sa puissance esthétique, magnifiée par les vapeurs sombres qui s’en échappe et sa silhouette élancée qui creuse le décor. Le train traverse des paysages champêtres et emprunte un viaduc qui, capturé de loin, lui donne l’allure d’un petit train électrique.

        Le train est un personnage à part entière, fonds Schwobthaler © MIRA

        Ce travail esthétique résonne avec un film de 1965 réalisé par Bernard Hoffner, qui immortalise l'arrivée et le départ d'un train à vapeur en gare de Thann. Les angles de vue variés mettent en lumière le charme de ce modèle de 1891 et le travail des cheminots qui manipulent l’engin. Le format 16mm offre à l’image une texture particulièrement riche : les vapeurs épaisses qui s’échappent de la locomotive sont palpables.

        Le modèle de 1891 en préparation et en marche, fonds Hoffner © MIRA

        Dans le cadre du projet Archives Capitales ! MIRA réunit dans un catalogue en ligne des séquences inédites tournées en Alsace et conservées dans les archives des cinémathèques européennes. Issues de cette collection, le film de Fernand Mouney (Reconstitution d'un train des années 1895) célèbre la magie et la nostalgie du train du XIXe siècle qui est célébrée en caméra embarquée à travers des images insolites (2). Cette parenthèse spatio- temporelle trouve écho dans un film de 1976 de l’opérateur Paul-André Jacquel qui se fascine pour un train à l’arrêt en le capturant sous plusieurs angles, jusqu’à pénétrer un wagon inoccupé. Cet instant suspendu est vite éclipsé par le quai qui retient l’attention : un agent nettoie le train, des techniciens s’agitent sur un plateau de tournage (3). Robert Witt, cinéaste amateur et chef d’atelier à la SNCF, embarque sa caméra jusque dans la cabine d’un train reliant Sélestat à Strasbourg. Si son film offre des vues insolites auxquelles nous n’avons jamais accès, il rend surtout hommage à la nouvelle rame de TGV de la ligne Strasbourg à Saint-Louis, construite en cette année 1978. Capable d’atteindre les 250km/h, le véhicule constitue un symbole d’aérodynamisme et d’avenir.

        À gauche, un wagon inoccupé, fonds Jacquel. À droite, l'opérateur s'immisce dans la cabine du train, fonds Witt-Deguillaume © MIRA

        L’aspect merveilleux du train est donc aussi le fruit d’un travail plastique qui frôle parfois l'artistique. Le prolifique Robert C. Weiss, lors d’un voyage en Chine en 1986, expérimente l’artifice sonore en diffusant de la musique électronique durant les séquences en train (Équinoxe de Jean-Michel Jarre), donnant à son trajet des allures de clip. Il capture en caméra embarquée ce serpent mécanique qui slalome, s’enfouit, creuse le décor, dessinant les contours d’une géographie et d’un paysage, objet de fascination des réalisateurs.

        Le train comme fenêtre-tableau

        Si le train fascine tant, c’est qu’il donne à voir, dans le confort et la chaleur de son ventre d’acier, les merveilles du monde. Les films véhiculent cette impression de paysage-tableau matérialisé par la fenêtre, devenue le cadre des fresques qui défilent sous nos yeux. Robert C. Weiss saisit cette image par un plan fixe d’une lampe accolée à la fenêtre. Une composition visuelle qui transforme quelques secondes en une peinture contemplative sur des carrières du nord de la Chine. L’opérateur Jean-Jacques Matern, au cours d’un rail-trip aux États-Unis en 1955, filme en continu le paysage qui apparaît et disparaît à l’écran. Vastes étendues, rivières transperçant les montagnes, collines arides... Les Grandes Plaines et les Rocheuses dressent le mythique décor des grands espaces américains.

        À gauche, le train parcourt le nord de la Chine, fonds Weiss. À droite, les grands espaces américains, fonds Kleinknecht © MIRA

        Capturer le décor en train, c’est aussi faire face à la vitesse. La beauté insaisissable du monde extérieur s’enfuit et le paysage se réduit à quelques éléments visuels fugaces, laissant au filmeur une connaissance superficielle du paysage. Si le décor est malmené par la vitesse, les cinéastes tentent régulièrement de se focaliser sur certains éléments. Animaux, églises et hameaux constituent tant de miniatures lointaines que les filmeurs suivent de l’objectif. On retrouve notamment ces anecdotes visuelles dans un film de Solange Fernex tourné en 1970, où l’on voit défiler une nature champêtre ponctuée de vaches et de chevaux dans les champs, de paysans et de maisons à colombages que l’opératrice suit de l’objectif tant bien que mal.

        Les vaches paissent dans le pré, fonds Fernex © MIRA

        Seul le tramway, qui avance à une allure modérée, ne nous vole pas le paysage. Le réalisateur Ralph Laclôtre (1895-1988), qui nous laisse un précieux patrimoine audiovisuel, nous emmène avec lui en 1929 à bord de l’iconique tramway du Mont-Blanc. Conditions techniques obligent, la vitesse n’est pas la priorité. Ce mouvement lent nous permet de contempler la chaîne de montagnes, les sapins, les chalets et le circuit des rails qui sillonne la neige à travers des images particulièrement esthétiques. L’opérateur Henri Boltz nous invite aussi à goûter au transport lent dans un film de 1965, tourné à Munich à l’occasion de l’Exposition Internationale du Transport, la première Exposition Internationale spécialisée en ce domaine. Le cinéaste prend place dans un monorail en hauteur et filme en caméra embarquée le circuit serpentin de l’engin qui parcourt le site. Les passagers qui débordent des fenêtres admirent les ouvrages industriels de ce musée à ciel ouvert : autobus, capsules de téléphériques et vieilles locomotives constituent le décor de ce trajet (4). Le film nous offre également des images de la gare de Munich depuis le monorail, ainsi que d’une reproduction de la première locomotive en Allemagne, surnommée Adler (aigle en français).

        À gauche, le train serpente dans le relief, fonds Laclôtre. À droite, balade en monorail, fonds Stirn © MIRA

        Un lieu de vie mobile

        Prendre le train, c’est aussi faire l’expérience d’un lieu en lui-même, marqué par un mobilier et un personnel. Solange Fernex filme un contrôleur dans le couloir et une transaction entre deux passagers. Robert C. Weiss capture une serveuse en plein service au wagon-restaurant, où les passagers sont installés autour de tables soigneusement dressées. Plus loin, l’opérateur filme une voiture couchette envahie par une jungle de draps blancs.

        Un contrôleur circule dans le wagon, fonds Fernex. Wagon-restaurant et voiture couchette dans un train chinois, fonds Weiss © MIRA

        Ces lieux font du trajet un véritable voyage dans lequel se dessine l’image du passager- voyageur, objet de l’attention des opérateurs. Ces derniers entretiennent la figure du rêveur à la fenêtre, le regard errant, tentant de saisir un paysage qui lui échappe. Les voyageurs eux-mêmes adoptent volontiers cette posture lorsqu’ils se savent filmés. Le film de Solange Fernex est ponctué de sourires complices entre le filmeur et les passagers qui essaient tant bien que mal de se concentrer pour regarder le paysage l’air méditatif. La filmeuse s’adonne aussi à filmer les passagers dans leur prélassement, leur paresse, voire leur sommeil (5). Parfois même les voyageurs brisent le filtre de la fenêtre en laissant échapper leur tête curieuse à l’extérieur. Chez Solange Fernex, la caméra dépasse de la fenêtre du train comme dépassent les têtes. La caméra de Jean-Jacques Matern prend l’air depuis le toit du train. Alex Schwobthaler lui, filme depuis le quai cette colonie de visages et de mains qui débordent du carreau.

        À gauche, fonds Fernex, Au milieu, le train de Jean-Jacques Matern aux États-Unis, fonds Kleinknecht. À droite, les têtes qui dépassent du train regardent l'opérateur, fonds Schwobthaler © MIRA

        Qu’ils errent dans leurs pensées ou qu’ils partagent un café, les voyageurs donnent vie au lieu. Ces occupants éphémères font du train un espace à la fois intime et collectif propice aussi bien au repos qu’au passe-temps. Ce dernier constitue naturellement une des raisons qui poussent les opérateurs à sortir leur caméra. Dans un film d’Aimé Nobert de 1944, un train de marchandise à l’arrêt accueille dans un wagon ouvert un groupe de soldats allemands, sourire aux lèvres. Une fois le train parti, la caméra embarquée saisit l’occupation du lieu par les militaires. Si beaucoup d’hommes s’abandonnent à leur fatigue, quelques-uns s’adonnent au loisir. Le wagon devient un espace de détente où l’on joue aux cartes et l'on discute dans l’esprit de la camaraderie militaire.

        Les soldats allemands se délassent avant le départ du train, fonds Steinmetz. L'atmosphère est chaleureuse dans le train de Solange Fernex, fonds Fernex © MIRA

        On retrouve une autre forme de camaraderie dans le film de Solange Fernex, qui emprunte le train avec ses camarades militants dans le cadre d’une manifestation contre le projet de centrale nucléaire à Kaiseraugst (6), dans les années 1970. En caméra embarquée, elle s’offre le loisir de filmer les lieux joyeusement investis. Les wagons se transforment en un espace d’échange et de convivialité, où les militants discutent entre eux, jouent aux cartes et rigolent. Une convivialité qui bourdonne de vie et de joie : un homme joue de l’accordéon tandis qu’une femme fait sonner une cloche en dehors du train depuis une fenêtre. Une palette de sensations à l’opposé des films plus touristiques centrés sur le paysage.

                      Sous l’œil des cinéastes amateurs, le train est bien plus qu'un simple moyen de transport. Il est un véritable personnage à part entière, capable d'enrichir la narration et de susciter des émotions. En définitive, n’est-il pas cousin de la pellicule ? S’ils se sont unis grâce aux frères Lumière, leur mouvement est fondamentalement le même : le train avance sur des rails, la pellicule sur une rangée de dents, dans un mouvement continu, hypnotique. Les deux impriment à toute vitesse des moments éphémères, des histoires cachées, muettes, qui s’éteignent une fois le train arrivé à quai et la bobine vidée. Ils nous font surtout voyager, l’un dans l’espace, l’autre dans le temps.

         

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        Notes

        (1) L’Arrivée d’un train en gare de la Ciotat, tourné par Louis Lumière l’été 1895, provoqua la stupeur du public lors de sa projection publique le 25 janvier 1896 à Lyon.

        (2) Dans un film réalisé par Fernand Mouney en 1952, les premières images étonnent. Nous sommes immergés en caméra embarquée dans un train où surgissent des visages qui nous viennent d’un autre temps. Robes drapées, chapeaux haut-de-forme et coiffes extravagantes nous replongent dans la France du XIXe siècle. Ce film a en effet été tourné pendant une fête célébrant le centenaire de la ligne ferroviaire Paris-Strasbourg. Si cette célébration témoigne peut-être d’une volonté de réaffirmer la présence de la SNCF dans la région après plusieurs années d’absence dues à la guerre, elle célèbre la magie du chemin de fer et du train des origines. Le film, issu de la collection de Ciclic (Centre-Val-de-Loire), est visionnable depuis le site de MIRA, rubrique « Archives capitales ! ».

        (3) Tournage du film Julia de Fred Zinnemann en 1976.

        (4) Si l’axe central de l’Exposition portait sur le transport ferroviaire, l’évènement accueillait aussi les ouvrages industriels du transport du transport maritime, aéronautique et routier.

        (5) L’opérateur filme un homme qui dort, la tête appuyée sur sa main.

        (6) Solange Fernex (1934-2016) est une figure majeure du mouvement écologiste français et alsacien. Fervente opposant des industries polluantes, elle mène son engagement dans les hautes sphères politiques comme dans les luttes plus militantes.

         

        AU FIL DES RAILS, FILMER LE VOYAGE EN TRAIN

         

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