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MiraMIRAMémoire des Images Réanimées d'AlsaceCinémathèque régionale numérique

Écrits sur images
      • Le cinéma paroissial en Alsace

      • Par Odile Gozillon-Fronsacq
      • Le cinéma paroissial en Alsace
      • Le cinéma paroissial a été très vivant au XXe siècle, en particulier dans sa première moitié. Il a touché des centaines de milliers de catholiques de tous âges, grâce à l’alliance réfléchie et efficace de professionnels du cinéma, d’hommes politiques, et de l’Eglise.

        Les conditions techniques

        Pour projeter des films, il faut à la fois du matériel et des compétences. Les grands producteurs de matériel cinématographique ont d’abord fabriqué des projecteurs 35mm, format standard dès l’origine. C’est un matériel haut de gamme, qui donne une très belle image, adaptée à une projection en salle.

        Mais il a de graves défauts : il coûte cher et, pendant des décennies, il utilise une pellicule nitrate, pour des « films flamme », qui ont provoqué des désastres. On se souvient de l’incendie du Bazar de la Charité qui en 1897 a fait plus de 125 morts dues au tout jeune cinématographe. Les constructeurs ont contourné ces obstacles en produisant des formats « substandards », plus pratiques, moins chers, et « safety », c’est-à-dire non inflammables. On est alors dans les années 20 : le Français Pathé invente le 9.5 mm (des films d’une largeur d’un peu moins d’un centimètre), et l’américain Kodak produit le 16 mm. Le premier est parfait pour les projections familiales, le deuxième donne une image d’une qualité supérieure, adaptée à des projections en salle, et non inflammable. Mais il est cher. C’est alors que Pathé réagit en diffusant un format qui est l’exacte moitié du 35 mm, donne une image parfaite, en étant beaucoup moins cher que le 35 : c’est le 17.5 mm. On est en 1927. La guerre des formats sera terrible.

        L’apport des politiques

        Comment trancher entre 16 et 17.5 ? La qualité est bonne dans les deux formats, mais il faut avoir les moyens de se procurer des projecteurs et des films. Pathé dispose d’un projecteur mis au point par un ingénieur maison, Marette, qui a perfectionné le matériel inventé dès 1898 par le méconnu Birt Acres. L’appareil Pathé est mis au point dès 1924. Il est présenté à la presse et aux professionnels au Congrès international du cinématographe en 1926. Puis Pathé lance en 1927 le Pathé Rural, c’est toute une organisation destinée à apporter le cinéma dans les campagnes, - comme son nom l’indique-, et dans les colonies[i]. Pathé imagine des caisses de format pratique, contenant tout le nécessaire : projecteur, films, revue, caméra. Et même, à partir de 1930, la caméra Motocaméra 17.5, qui permet de tourner des actualités locales.
         

        Caisse contenant des films 17.5 prêts à être envoyés dans une paroisse

        Cependant cela a un coût. Des professionnels alsaciens du cinéma vont alors faire jouer des mobiles économiques et politiques. Un argument économique : il faut faire un cinéma français. La crise de 29 touche le monde entier, il faut défendre le cinéma tricolore face à l’invasion du cinéma étranger, américain en particulier. Un argument politique aussi : il faut franciser grâce au cinéma, pour faire face à la montée de l’autonomisme alsacien. C’est dans ce contexte qu’en 1928 est créé le « Groupement Alsacien d’Entente Nationale », pour « lutter par une forte propagande éducative contre les mouvements autonomistes et communistes »[ii] . Elle est soutenue par de grands industriels alsaciens comme « Monsieur Burrus, industriel député du Haut-Rhin, Sainte-Croix-aux-Mines ». Ce sera le grand boom du cinéma paroissial.

        Le Cinéma Rural d’Alsace et de Lorraine

        Jouant sur ces deux tableaux, la famille Hahn, pionnière du cinéma en Alsace, va avoir une action déterminante. Très francophile et très catholique, elle a noué de bons rapports avec la hiérarchie catholique, et avec les politiques. Charles Hahn, qui fut à la fois réalisateur, exploitant, vendeur de matériel cinématographique, responsable syndical du cinéma, s’appuie sur son fils Emile pour développer le cinéma paroissial. Ils créent le Cinéma Rural d’Alsace et de Lorraine, si utile pour « Faire connaître la France par le cinéma. Empêcher l’introduction des films à tendance allemande dans les campagnes »[iii].
         

        Le Cinéma Rural d’Alsace et de Lorraine, partenaire de Pathé Rural, est fondé par Charles Hahn, pionnier du cinéma en Alsace, et dirigé par son fils Emile Hahn. C’est le grand distributeur de films pour le cinéma paroissial dans l’Est de la France.

        Leur partenaire cinématographique sera Pathé, qui leur enverra des films Pathé Rural. Ensemble ils diffusent des films français dans de nombreuses paroisses d’Alsace. Ils ont soin de préalablement créer des sous-titres bilingues pour être compris des populations encore très majoritairement dialectophones des campagnes alsaciennes.

        Le « cinéma du curé »

         « Cinéma Rural, Cinéma Überall », proclame la publicité du Cinéma Rural d’Alsace et de Lorraine. Mais c’est surtout dans un cadre paroissial qu’il s’épanouit. Le prix était attractif : « Nous achetions à bas prix des négatifs de 35 mm déjà exploités, cela réduisait à peu de chose le prix de revient des programmes », explique Charles Pathé[iv]. Les films sont muets, commentés en direct par le curé ou un paroissien, et sonorisés quand c’est possible par un pianiste amateur. Le projectionniste est un paroissien bénévole. Le public est familial.

        Les films distribués par le Cinéma Rural d’Alsace et de Lorraine étaient soumis à un contrôle ecclésiastique. Emile Hahn, le directeur, entretenait de bonnes relations avec l’Eglise catholique, et soumettait aux autorités religieuses les films qu’il allait diffuser dans les paroisses.
         

        Séance de visionnage de films Pathé Rural par des autorités ecclésiastiques (Archives privées)

        Le comité de censure des prêtres est publié par Pathé dans un supplément à la revue « Le cinéma partout et pour tous ». On veille à supprimer « tous les nus, tous les décolletés, et tous les gestes audacieux », ainsi que les scènes de violence. L’accord de l’Eglise rassurait les curés et donnait toute confiance aux familles.

        Des films Pathé

        Pathé Rural propose 10 000 kilomètres de films, produits par Pathé, ou dont les droits ont été rachetés à d’autres producteurs. Le Cinéma Rural d’Alsace et de Lorraine choisit dans ces centaines de films ceux qui ont été cautionnés par l’Eglise :

        Ce qu’il faut dans nos salles, c’est le film d’atmosphère catholique. Baigner le spectateur dans cette atmosphère, sans qu’il s’en aperçoive. Il respirera cette atmosphère bienfaisante et chaude (…). Que ce soit drame ou comédie, qu’importe. Il faut un sage dosage, assainir sans donner l’impression qu’on veut imposer des idées ou des impressions[v].

        Cet état d’esprit plutôt libéral exaspère les exploitants privés qui s’indignent :

        Qu’un film joué dans un cinéma disons régulier, et dont le directeur paye ses taxes et redevances, soit honni pour sa soi-disante immoralité, et que ce film passe ensuite dans une salle du circuit Pathé-Rural avec l’étiquette « Bon pour le patronage », et même « passable dans les séances enfantines », c’est tout de même un procédé peu banal[vi].

        Les films proposés composaient en général un spectacle de 2 heures 30, avec documentaires, actualités, et « grand film ». J’ai retrouvé un fonds qui donne idée de la programmation. Il y avait beaucoup de comiques, comme Beaucitron détective, Charlot amateur de golf, Harold régisseur…, des drames comme La Vestale du Gange (en 6 parties), des westerns, des documentaires, des actualités…
         

        Les films paroissiaux devaient séduire le public, retenir les familles dans la proximité de l’Eglise. Ici, Fanfan la tulipe (adapté d’un film 35 mm de 1925)

        Le déclin du cinéma paroissial

        A son apogée en 1931-1932, le Cinéma d’Alsace et de Lorraine dessert 460 communes, c’est un succès extraordinaire. Il domine toute la diffusion du cinéma paroissial.

        Mais l’arrivée du cinéma parlant amorce le déclin du cinéma paroissial. Dans les campagnes alsaciennes, le public ne comprend pas le français. Or Pathé n’a pas un marché suffisant pour faire une version allemande de ses films. Puis l’annexion nazie impose son contrôle total du cinéma, interdisant très vite le format 17.5, et diffusant ses propres films.

        Il faudra attendre les années 50 pour voir refleurir le cinéma de patronage. Des passionnés bénévoles passeront des films 16mm avec l’approbation des curés. Mais le cinéma paroissial sera rapidement concurrencé par la télévision. Ses belles heures sont passées.

         

        [i] Charles Pathé, de Pathé Frères à Pathé Cinéma, cité dans Pathé, Premier empire du cinéma, Jacques Kermabon dir., Centre Pompidou 1994, p.202.

        [ii] Note du Groupement Alsacien d’Entente Nationale, Archives d’Alsace, s.d., 98 AL 622, I.

        [iii] Note sur La propagande française par le Cinéma Rural en Alsace et en Lorraine, Archives d’Alsace, 98 AL 622

        [iv] De Pathé Frères à Pathé Cinéma, cité dans Pathé, premier empire du cinéma, p. 203.

        [v] In Le Cinéma partout et pour tous, juin-juillet 1934, cité dans Pathé, Premier empire du cinéma, p. 205.

        [vi] Dans la revue professionnelle « Cinéma d’Alsace et de Lorraine », janvier 1933.

      • Publié le 21/02/2025

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