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MiraMIRAMémoire des Images Réanimées d'AlsaceCinémathèque régionale numérique

Écrits sur images
      • UN CINÉMA HUMANISTE : ALBERT KAHN OU LA PAIX PAR L’IMAGE

      • Par Odile Gozillon-Fronsacq
      • UN CINÉMA HUMANISTE : ALBERT KAHN OU LA PAIX PAR L’IMAGE
        • Numéro d'inventaire A 18 700 Opérateur Georges Chevalier, Mission Jean Brunhes et Georges Chevalier en Alsace et Allemagne (octobre 1919). Collection Archives de la Planète, Musée Albert Kahn/Département des Hauts-de-Seine. Voir [collections.albert-kahn.hauts-de-seine.fr] pour les conditions d’utilisation. L'école juive de Marmoutier en 1919, Autochrome.
      • Banquier et mécène, Albert Kahn est le fondateur des ARCHIVES DE LA PLANETE. Alsacien exilé à la suite de la guerre de 1870, il a réalisé les plus importantes archives audiovisuelles du XXè siècle. Son utopie : mettre l’image au service de la paix.

        Une jeunesse alsacienne (1860-1876)

        Abraham Kahn est issu d’une famille juive alsacienne. Son père, marchand de bestiaux à Marmoutier, petite ville du Bas-Rhin, l’envoie à l’école juive de la commune. Elève brillant, il pourra poursuivre ses études au lycée de Saverne, grâce semble-t-il aux aides financières collectées par son instituteur.

        La formation parisienne

        En 1870, Abraham perd sa mère. En 1871, il devient allemand, comme tous les Alsaciens. Estimant que ses enfants seront mieux accueillis par la République française que par le Reich allemand, son père décide de l’envoyer à Paris. Il n’est pas le seul : un quart des juifs alsaciens quittent la province devenue allemande. En 1876, le jeune homme est confié à de lointains parents qui tiennent la banque Goudchaux. Il a seize ans.

        Le jour, Albert travaille comme petit employé de banque. Le soir, il poursuit ses études pour se présenter au baccalauréat. Il cherche un répétiteur. On lui présente un jeune homme d’un an son aîné, qui vient d’entrer à l’Ecole Normale Supérieure : Henri Bergson. Ils seront amis toute leur vie. En 1881, Albert Kahn est bachelier ès-lettres.

        Il commence à voyager et poursuit ses études. En 1884, il est licencié en droit. Peu après il séjourne au Transvaal et se familiarise avec le fonctionnement des mines d’or et de diamant, sources de profit pour sa banque. En 1887 il écrit à son ami Bergson : « Cela va assez bien en ce qui concerne les affaires, mais vous le savez, ce n’est pas mon idéal. »

        Le banquier éclairé

        En 1892, il est l’associé principal de la banque Goudchaux, et en 1895 il en est le propriétaire. Il est riche, très riche. Mais sa vie est relativement austère : des vêtements ordinaires, des repas végétariens, aucune présence personnelle dans la presse. Ses luxes : l’art, la nature, la musique (il a sa loge à l’Opéra, se rend régulièrement au Festival de Bayreuth). Il ne fonde pas de famille, mais prend plaisir à recevoir ses nombreux amis : des écrivains (Colette, Anatole France, Anna de Noailles, Thomas Mann, Péguy, Rabindranath Tagore…),  des artistes (Rodin, Manuel de Falla, etc.), des patrons d'industrie (les Rothschild, Marcel Dassault, Louis Lumière, André Michelin...), des scientifiques (Einstein, le Dr Comandon, chercheur en biologie et pionnier du cinéma scientifique…), divers intellectuels (Henri Bergson, Paul Appell, Jean Brunhes...), des responsables politiques et militaires (Philippe Pétain, des chefs d’Etat et monarques étrangers…)   dans sa propriété de Boulogne ou dans la luxueuse villa qu’il a fait construire en 1902 à Roquebrune-Cap-Martin, sur la Côte d’Azur. Ce qui le passionne, c’est la découverte des idées et des arts, portés par des personnalités hors du commun.

        Son autre grande passion est la connaissance directe du monde par le voyage, avec une prédilection pour le Japon. Il y a des intérêts financiers, mais surtout il se sent en grande affinité avec la culture japonaise, et il a noué de profondes amitiés avec des hommes d’affaires, des intellectuels et des responsables politiques japonais. Sa curiosité cependant est mondiale : il multiplie les longs voyages sur tous les continents. Voyager, pour lui, c’est « garder les yeux ouverts ». Pragmatique, Albert Kahn en fait la base d’une pensée éclairée, et il va donner aux jeunes les moyens de découvrir le monde.

        Le mécène

        En 1898, Albert Kahn crée les « BOURSES AUTOUR DU MONDE », destinées à financer les voyages de jeunes professeurs français, japonais, américains, russes, anglais, allemands...  « afin de vivifier la fonction d’enseignement, en substituant pour la première fois aux thèses dérivant des livres, des Réalités conformes à la Vie ». Ces voyages sont de véritables écoles de journalisme. L’un des boursiers, Philippe Millet, deviendra le directeur de l’hebdomadaire L’Europe nouvelle, fondé par Louise Weiss. En 1898, Kahn fonde le « CERCLE AUTOUR DU MONDE », réunissant les bénéficiaires des Bourses autour du monde et les élites de la planète, « afin de confronter leur documentation et de la faire rayonner au profit de l’ensemble de la collectivité ».

        Ces réunions ont lieu dans sa villa de Boulogne et se prolongent par la visite de ses jardins, vivants symboles de la diversité de la vie (il a fait planter autour de sa propriété de quatre hectares un jardin japonais, un jardin anglais, un jardin français, une forêt vosgienne, une roseraie…).

        En 1908-1909, Albert Kahn fait le tour du monde avec son chauffeur Alfred Dutertre, qu’il a eu soin de faire former chez Pathé comme photographe et cameraman. Ils en rapportent 3000 plaques stéréoscopiques noir et blanc, des autochromes Lumière, et plus de 4000 mètres de film. Il va ensuite systématiser cette expérience : en 1909-1910, le mécène fonde les « ARCHIVES DE LA PLANETE ». Des photographes et cinéastes professionnels vont réaliser 72000 plaques autochromes, 4000 plaques stéréoscopiques, et environ 180 kilomètres de films 35 mm nitrate (une centaine d’heures) pris dans quarante pays différents entre 1909 et 1929. Chaque photo ou film est accompagné d’une fiche rigoureuse, mentionnant la date, le lieu, et des indications complémentaires sur le sujet. Un état du monde en images, d’une dimension unique, d’un intérêt fabuleux.

        En 1914, Albert Kahn crée avec son compatriote Paul Appell le « COMITE DU SECOURS NATIONAL », au service des civils victimes de la guerre. C’est une œuvre caritative qui va lever des fonds pour « venir en aide, à Paris et en province, aux femmes, aux enfants et aux vieillards dans le besoin, sans distinction d’opinions ni de croyances religieuses ». Selon L’Illustration, il servit plus de 60 millions de repas et distribua 65 millions de francs, organisa des cantines, des orphelinats, des secours en espèces, l’assistances aux réfugiés, etc. Par ailleurs, il va mettre ses moyens au service de la victoire française. En 1916, il fonde le « COMITE NATIONAL D’ETUDES SOCIALES ET POLITIQUES », « au profit de la Nation et de l’ensemble du monde » ; domicilié à l’école Normale Supérieure, il n’édite pas moins de treize revues servant à la documentation des chercheurs et des décideurs. Pendant le conflit il s’associera au gouvernement et à l’armée pour défendre par le cinéma le point de vue de la France, et fait filmer par ses opérateurs les terribles destructions de la guerre.

        Après la guerre, il met sa fortune au service de la science. Il crée en 1928 un « CENTRE DE BIOLOGIE », « pourvu d’appareils permettant d’enregistrer au cinéma la vie de la matière, des plantes, des animaux ; de grossir, de réduire leurs aspects pour les adapter à l’échelle de nos sens, d ’en accélérer ou d’en ralentir à volonté le rythme... ».

        Persuadé de l’intérêt de la prophylaxie par le Comité National d’Etudes Sociales et Politiques, il crée en 1929 le premier « CENTRE DE MEDECINE PREVENTIVE » à l’université de Strasbourg, destiné d’abord aux étudiants en médecine, puis à tous les étudiants. L’État autorise peu après les universités à percevoir une taxe pour financer ces centres, et dans les années trente l’exemple strasbourgeois sera suivi à Lyon, Paris, Bordeaux, Toulouse, Caen, Poitiers, Grenoble, Montpellier.

        L’archiviste du monde : l’image au service d’un idéal

        Les Archives de la Planète sont une œuvre unique et monumentale. Pendant plus de vingt ans, des opérateurs ont enregistré dans le monde entier la vie des humains de tous les continents. Pourquoi Albert Kahn a-t-il porté pendant tant d’années et avec une telle volonté, l’élaboration de ce trésor en images ?

        Vaincre la mort et l’oubli

        Albert Kahn a très tôt été intéressé par le cinéma : « La photographie stéréoscopique, les projections, le cinématographe surtout, voilà ce que je voudrais faire fonctionner en grand, afin de fixer une fois pour toutes des aspects, des pratiques et des modes de l’activité humaine dont la disparition fatale n’est plus qu’une question de temps », dit-il en 1912.

        On voit ici la volonté de garder vivants les modes de vie si divers, - et si menacés, des hommes aux quatre coins de la planète. Les grands thèmes des prises de vues sont : les manières de répondre aux nécessités vitales (se vêtir, se nourrir, dormir, se vêtir, se loger) ; les modes d’exploitation de la terre ; les organisations sociales ; la géographie politique, les mouvements sociaux et politiques.

        Réfléchir sur les images

        Photos et films permettent une étude ultérieure : ils sont des documents destinés à « continuer à divulguer partout les enseignements que comporte le tableau direct de l’évolution », bases d’une réflexion scientifique. Le directeur des Archives de la planète est son ami le grand géographe Jean Brunhes. Titulaire de la chaire de Géographie Humaine créée au Collège de France en 1912 (avec les fonds d’Albert Kahn), il utilisera ces Archives comme base de son enseignement. En retour, la géographie humaine servira de science organisatrice des Archives de la Planète.

        Connaître les autres pour préserver la paix

        Les Archives doivent aussi servir le grand idéal d’Albert Kahn : permettre aux hommes des différents pays de se connaître, sinon « en présentiel », comme on dirait aujourd’hui, mais au moins par l’image. Elles sont donc complémentaires des Bourses autour du monde, réservées à une élite de jeunes enseignants, et s’adressent à ceux qui ne peuvent voyager. Il ira jusqu’à pressentir que ces images pourront atteindre un jour tous les citoyens, par ce qui sera bientôt la télévision.

        Car pour lui, seule l’ignorance conduit à la guerre. C’est pourquoi il faut miser sur la connaissance, transmise par l’école (spécialement l’université), par les rencontres, ou par l’image : « L’utopie d’Albert Kahn vise au développement de la compréhension et de la coopération entre les peuples et s’incarne dans un travail continu et rigoureux de documentation sur les réalités quotidiennes des nations ».

        La ruine

        La crise de 1929 et la volonté d’Albert Kahn de continuer à soutenir coûte que coûte ses fondations, le conduisent à la ruine.

        En 1932, ses biens sont saisis. En 1936, le Département de la Seine acquiert la villa et les collections, qui deviennent accessibles au public.

        Dans la nuit du 13 au 14 novembre 1940, Albert Kahn meurt, seul.

        La postérité

        Albert Kahn est resté méconnu pendant des décennies. A sa mort, ses films et photos sont estimés à 500 francs, - le prix de ses valises. Ce sont d’abord ses autochromes qui retiennent l’attention, mais on ne saisit pas l’intelligente cohérence de son œuvre, et le risque est grand de voir son héritage complètement dispersé. Il faut attendre 1974 pour qu’on crée un poste de conservateur de l’ensemble de ses créations : maison, jardins, images, documentation. Mais il n’y a alors qu’une seule personne en charge de ses collections : Jeanne Beausoleil. Elle accomplira une œuvre magnifique au service de l’œuvre d’Albert Kahn et réussira à rassembler plusieurs dizaines de de personnes au service de cette mission.

        Aujourd’hui, les originaux de ses films sont conservés aux Archives du Film de Bois d’Arcy, mais le Musée Albert Kahn a créé, en 1990, un superbe espace d’exposition de 700 mètres carrés qui a permis au public de prendre connaissance des Archives de la Planète, dans le cadre somptueux de la villa et des jardins créés au début du XXème siècle par Albert Kahn. Les techniques les plus modernes de conservation et de consultation sont utilisées pour préserver ce fabuleux héritage et le mettre à la disposition de toute l’humanité, ce qui est servir l’idéal généreux et pacifiste de cet Alsacien hors du commun. En 2015, les jardins dans leur totalité, la maison d'Albert Kahn à Boulogne, les pavillons japonais et les jardins sont inscrits à l'inventaire des monuments historiques.

        Depuis septembre 2014, de grands travaux sont entrepris sous la direction de l'architecte Kengo Kuma, pour la construction d'un bâtiment d'exposition et la rénovation des bâtiments existants, qui donnera au public l'accès à un parcours permanent dans le courant 2021 https://albert-kahn.hauts-de-seine.fr/un-nouveau-musee-pour-2021/l-ambition-du-projet. Dans le même temps, la collection des Archives de la Planète, comportant 60 000 images, est accessible en ligne sur le portail Collections : http://collections.albert-kahn.hauts-de-seine.fr/

        Longtemps méconnu, ce génial utopiste alsacien est aujourd’hui considéré à juste titre comme un précurseur de la défense d’un humanisme moderne fondé sur le respect de l’homme et de la nature. A la base de toute sa pensée, il y a la certitude que la tolérance accompagne nécessairement une vraie connaissance de l’autre, qui dans son esprit ne peut conduire qu’au partage et à la paix. Ignorant sa propre gloire, il était profondément altruiste : « JE TRAVAILLE POUR l’HUMANITE, je sers le genre humain. » Et l’image a joué un rôle majeur dans cette superbe ambition.

        Éléments bibliographiques

        • - Sous la direction de Jeanne BEAUSOLEIL et Pascal ORY : Albert Kahn (1860-1940), Réalités d’une utopie, Edition Musée Albert Kahn, - Département des hauts de Seine, 1995, 407 p.
        • - Sophie COEURÉ et Frédéric WORMS, Préface de Jeanne BEAUSOLEIL : Albert Kahn, Henri Bergson, Correspondances, Coédition Desmaret/Musée départemental Albert Kahn, 2003, 157 p.
        • - Dominique JUNG, Pascal LEMAÎTRE, Vladimir VASAK :   L’Alsace d’Albert Kahn, premières photos couleurs 1917-1921, Gérard Klopp éditeur, 2009, 117 p.
        • - Sophie COUËTOUX : Albert Kahn, singulier et pluriel, Editions Lienart, 2015, 304 p.

        Éléments cinématographiques

        Pour une recherche plus complète, on pourra consulter :

        https://data.bnf.fr/fr/11863141/albert_kahn_musee_et_jardins_boulogne-billancourt__hauts-de-seine/

        Numéro d'inventaire A 709, opérateur Stéphane Passet
        Collection Archives de la Planète, Musée Albert Kahn/Département des Hauts-de-Seine
        Voir
        [collections.albert-kahn.hauts-de-seine.fr] pour les conditions d’utilisation

        Faubourgs de Beijing, juillet 1912. Autochrome
        Les Archives de la planète permettent de retrouver le Pékin ancien, aujourd’hui disparu.

        Numéro d'inventaire C 1 060 Opérateur Camille Sauvageot
        Collection Archives de la Planète, Musée Albert Kahn/Département des Hauts-de-Seine.
        Voir
        [collections.albert-kahn.hauts-de-seine.fr] pour les conditions d’utilisation. 

        Le prince et la princesse de Corée, invités par Albert Kahn, sur la terrasse de la villa Albert Kahn à Cap-Martin, en 1927. Autochrome.

      • Publié le 20/01/2021

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